Femmes au travail







La rentrée des ouvrières


Dès qu’il arrive à Paris, en 1881, Steinlen, Vaudois de naissance, se rapproche des milieux ouvriers anarchistes dont il accepte d’illustrer régulièrement (La Voix du Peuple, Le Chat noir, Le Chambard socialiste, La Feuille, L’Assiette au beurre…). Il s’intéresse donc tout naturellement au monde du travail et spécialement au labeur des femmes, objet de débats acharnés, en France, durant la seconde moitié du XIXe siècle.
La Rentrée des ouvrières est l’œuvre d’un dessinateur-illustrateur talentueux plus que d’un peintre habitué aux paysages. Dans ce tableau inachevé et de petites dimensions, Steinlen étale copieusement , comme Toulouse-Lautrec, Vuillard et Daumier qu’il côtoie alors. Très sensible à l’atmosphère industrielle des rues populaires de la capitale, il recourt aux teintes ternes ou sombres pour exprimer la pollution de l’air. Les et salissent le ciel ; les rayons du soleil, beige clair, ont du mal à percer les nuages violines. Sur ce décor voilé, des femmes « en cheveux », dont seules les blouses blanches ou rouges tranchent sur la morosité ambiante, affichent leur condition d’ouvrières par leur vêtement comme par leur gestuelle. La présence d’un , au centre de la composition, rappelle que l’artiste fut aussi graveur et sculpteur animalier.
L’artiste parcourt les rues de la capitale pour dénoncer la misère et les violences . Au premier plan, sur la gauche, figure , silhouette cassée et bouche tordue de douleur, épuisée et par l’énorme baluchon de linge qu’elle tient contre sa hanche. Au second plan, une mère avec son bébé dans les bras rappelle que rien n’est fait pour celles qui travaillent, que les crèches, à peine créées, sont trop peu nombreuses, que l’ouvrière doit donc se résoudre à confier son nouveau-né à une soigneuse souvent négligente ou l’emporter partout avec elle, lui administrant parfois de la thériaque ou pour le faire dormir.
Les ouvrières sont exténuées mais certaines marchent pour dire l’amitié professionnelle qui les lie et que redoutent tant les élites misogynes. À l’heure de « la rentrée », elles envahissent l’espace public. Formant déjà une foule compacte, elles ne tarderont pas à être associées .

Oefeningen - Exercices de français Auteur : Myriam Tsikounas
Peinture : La rentrée des ouvrières. Théophile Alexandre Steinlen